Dans une de notre dernière étude, nous nous somme intéressés à ce qui peut contribuer la variabilité de production de graines, phénomène qu’on appelle aussi le masting. Le masting se définit comme la variation de production de graines, avec des années de production de graines abondantes et des années de faible production. On retrouve des termes dérivés, commes la glandée (chez les chênes), ou la faînée (chez le hêtre), ou cette production massive de graines influence la dynamique des autres espèces (ces graines sont consommées par pleins d’animaux). Les années de fortes productions de graines, c’est l'abondance (et meme une faible quantite de graines peut échapper aux prédateurs de graines et assurer la pérennité de l'espèce de plante), et les années de faible productions, c’est la famine pour les animaux.
Un nouvel endroit a coloniser! - ou pas -
Ces alternances entre années d’abondance et de famine confèrent un avantage aux plantes en terme de valeur adaptative ou fitness. Les plantes ne peuvent pas se déplacer ni se cacher aussi facilement que les animaux, et cette variabilité de production de graines (le masting) leur permet, d’une certaine manière, d'échapper aux prédateurs (graines à foison = prédateurs gavées de graines = plus de chances que certaines graines pourront survivre et donner de nouveaux plants). Un autre avantage du masting est lié à la pollinisation. Si toutes les plantes se reproduisent en meme temps, il y a donc plus de pollen dans l’air, et aussi plus de chances de féconder des fleurs (cela augmente le succès de la pollinisation).
Mais, cette stratégie de reproduction a un coût, en particulier sous la forme d’opportunités de reproduction manquées. Par exemple, si on a une brèche dans une forêt (suite a un incendie, une tempête), il n’y aura aucune graine disponible pour coloniser cet espace. D’autres plantes, par exemple qui produisent des graines chaque année, elles, pourront saisir cette opportunité. Si les plantes qui font du masting manque a chaque fois ces opportunités, elles pourront meme se faire envahir par ces plantes qui produisent des graines constamment. Le second example est associé au risque de mourir avant même que la plantes ait eu le temps de se reproduire. Si les bambous qui mettent plusieurs décennies avant de se reproduire, accumulent des resources sans avoir le temps de se reproduire avant de mourir, auront accumulé ces resources pour rien. Meme si ce risque reste relativement rare, les coûts associés à la reproduction n’ont a l’heure actuelle jamais vraiment été testé.
Localisations des différents jeux de données de production de graines. Le graphique a droite presente quelles sont les biomes associées (eg, forêt boréales, forêt tropicales, etc).
Nous avons bénéficié ici d’une large base de données de production de graines (appellée MASTREE+) regroupant plus de 70 000 observations sur près de 1000 espèces de plantes. Nous avons mis en lien ces données de production de graines, avec les traits fonctionnelles des espèces. Ces traits sont des indicateurs de stratégies des espèces. Un exemple de trait fonctionnel est la surface des feuilles: une plante avec des feuilles plus petites (par exemple un sapin), sont moins couteuse en énergie (comparé par exemple a une large feuille de chêne). Un second exemple de trait fonctionnel est la densité de bois: une espèce de plantes avec une densité de bois plus élevée est plus resistante et aussi moins exposée au risque de mortalité. Mais le problème ici, c’est que ces traits fonctionnels peuvent etre liés entre eux. Les résineux ont par exemple tous des petites feuilles, et il est possible que les corrélations que l’on trouve entre production de graines et traits fonctionnelles ne vient pas des traits eux-mêmes, mais simplement de la phylogénie des espèces, ou des espèces prochent entre elles partagent des caractéristiques communes (ici par exemple ou les resineux ont tous des petites feuilles).
hêtre ou ne pas hêtre...des faînes sur une branche (©Jessie Foest 2023)
Ainsi, en tenant compte de la phylogénie des espèces et du climat, on a pu observer que la densité de bois est liée au masting. Le taux de mortalité étant plus faible chez des espèces avec une densité en bois plus élevée, peut atténuer les opportunités de reproduction manquées. Ces coûts de reproduction retardés semblent être impliqués dans l'évolution du masting chez les plantes.
Un résumé est aussi disponible (en anglais) ici : https://communities.springernature.com/posts/plants-that-live-longer-mast-stronger
et l'etude originale:
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